Programme numérique

Eine florentinische Tragödie


Richard Flury
Texte d’Oscar Wilde, traduit en allemand par Max Meyerfeld

L'Heure espagnole


Maurice Ravel 
Texte de Franc-Nohain

Intrigue

Eine florentinische Tragödie

Simone, un commerçant florentin, revient d'un voyage d'affaires. Il est inquiet car le séjour a été infructueux et il n'a que peu vendu. Un visiteur qu’il ne connaît pas se trouve chez sa femme Bianca: Guido Bardi, prince de Florence – l’amant de Bianca.
Simone se montre accueillant et propose à Guido d'acheter de beaux costumes, ce à quoi le prince réagit avec une arrogance affichée: il annonce avec désinvolture qu'il enverra son intendant le lendemain; celui-ci est censé payer à Simone beaucoup plus que le prix demandé. Guido se montre par ailleurs peu intéressé par les efforts de Simone pour engager la conversation. Simone l’interroge sur les marchés, sur les rumeurs de baisse des prix causée par la concurrence des marchands et sur une guerre éventuelle – des choses qui l'inquiètent et sur lesquelles le prince, en tant que fils du souverain, pourrait peut-être en savoir plus. Guido ne répond à rien de tout cela en exprimant au contraire de plus en plus ouvertement son intérêt pour Bianca.
Un froid règne entre Simone et Bianca, elle le repousse et lui est hostile. Celui-ci garde la face et offre du vin à Guido, mais ce dernier continue à réagir de manière hautaine finissant par annoncer qu'il va s’en aller et qu'il reviendra le lendemain auprès de Bianca.
La situation tendue s'aggrave: Simone incite Guido à se battre. Bianca pousse Guido à tuer son mari. Mais les choses se passent autrement...
Bianca et Simone se voient soudain d’un regard nouveau: «Pourquoi ne m’as-tu pas dit que tu étais si fort?», demande-t-elle. Il répond: «Pourquoi ne m’as-tu pas dit que tu étais si belle?»

L'Heure espagnole

Une horlogerie à Tolède: le muletier Ramiro apporte une montre défectueuse à la boutique de l'horloger Torquemada. Il doit l'attendre une heure, le temps que Torquemada remette à l’heure les horloges de la ville.
Cependant, l’épouse de Torquemada, Concepción, n'apprécie pas du tout la présence de Ramiro, car elle attend son amant Gonzalve. Pour tenir Ramiro à l’écart, elle lui demande de porter une grande horloge jusqu’à sa chambre à coucher – avant de la redescendre un peu plus tard. Ramiro est heureux que cette femme charmante lui donne de quoi l’occuper et il accepte volontiers de porter les horloges de haut en bas. 
Concepción pousse Gonzalve à se cacher dans l'une des horloges que Ramiro, sans se douter de rien, porte dans sa chambre. Gonzalve ne fait que réciter des poèmes narcissiques dès son arrivée et ne profite pas de ce temps passé dans la chambre à coucher comme le souhaiterait Concepción. Celle-ci le fait redescendre dans horloge, portée par Ramiro.
Un autre candidat à l'amour est le banquier Don Iñigo qui a attendu l'absence de Torquemada pour s'approcher de Concepción. Il se cache lui aussi dans une horloge et voit sa chance lorsque l'ingénu Ramiro apporte cette horloge dans la chambre à coucher. Mais Don Iñigo, en raison de son embonpoint, ne peut pas s’en libérer. 
Concepción demande donc à Ramiro de redescendre cette horloge. Elle est contrariée de voir que son heure de liberté conjugale s’écoule sans en profiter. Mais elle a depuis longtemps remarqué la gentillesse et la force de Ramiro. Elle décide alors de l'emmener dans sa chambre – sans horloge.
À son retour, Torquemada trouve Gonzalve et Don Iñigo dans la boutique. Iñigo est toujours coincé dans «son» horloge et il faut déployer des efforts considérables pour l’en faire sortir. Torquemada profite de l'occasion pour vendre une horloge à chacun des deux hommes se disant passionnés d'horlogerie. Désormais, ce sera à Ramiro de donner l'heure chaque matin à Concepción.

 Informations complémentaires

Durée: env. 2 heures 10 minutes entracte inclus
Âge recommandé: 14+

Eine florentinische Tragödie (Une tragédie florentine)
Richard Flury
Opéra en un acte
Texte d’Oscar Wilde, traduit en allemand par Max Meyerfeld
Chanté en allemand avec des surtitres a/f

Création 09/04/1929, Théâtre municipal de Soleure 
Arrangé pour orchestre de chambre par Paul Mann


L’Heure espagnole
Maurice Ravel
Comédie musicale en un acte
Livret de Franc-Nohain
Chanté en français avec des surtitres a/f

Création 19/05/1911, Opéra-Comique, Paris
Arrangé pour orchestre de chambre par Klaus Simon

«Larges coups de pinceau, filets à mailles serrées»
 

Le chef d'orchestre Paul Mann à propos de la double soirée avec Flury et Ravel.

Vers l'interview

Distribution

Distribution

Direction musicale Paul Mann
Mise en scène Anna Magdalena Fitzi
Décors et costumes Verena Hemmerlein
Conception lumière Mario Bösemann
Collaboration chorégraphique Damien Liger
Dramaturgie Meike Lieser
Assistance à la mise en scène et régie de plateau 
Larissa Copetti-Campi | Damien Liger
Répétiteurs Francis Benichou | Riccardo Fiscato
Stagiaire costumes et décors Nicolas Hartmann

Eine florentinische Tragödie
Bianca Rebekka Maeder
Simone Martin Achrainer
Guido Bardi Martin Mairinger

L’Heure espagnole 
Concepción Josy Santos
Ramiro Martin Achrainer
Gonzalve Martin Mairinger
Don Iñigo Gomez Flurin Caduff
Torquemada Konstantin Nazlamov

Orchestre Orchestre Symphonique Bienne Soleure TOBS!

Technique

Technique

Directeur technique Günter Gruber
Responsable des décors et ateliers Vazul Matusz
Responsable atelier couture Gabriele Gröbel
Responsable technique Adrian Kocher  

Menuiserie Simon Kleinwechter | Steven McIntosh | Raphael Schärer
Atelier peinture Daniel Eymann (Responsable) | Julian Scherrer
Atelier décoration Ursula Gutzwiller

Maquillage et perruques opéra Sandra Widmer (Responsable) | Miriam Krähenbühl
Accessoires Sara Fichera (Préparation) | Sara Fichera | Arno Jäger (Représentations)

Atelier couture Natalie Zürcher | Catherine Blumer (Tailleures dames) | Sarah Stock | 
Janine Bürdel (Tailleures hommes) | Christine Wassmer (Adjointe Admininistrative) | 
Katrin Humbert / Anne Jean-Petit-Matile (Remplacement de congé de maternité) | 
Dominique Zwygart
Habilleuses Lara Studer | Museng Fischer | Pascale Berlincourt | Verena Graber

Chef de plateau Bienne Samuele D'Amico
Chef de plateau Soleure Rémy Zenger
Chef éclairagiste Bienne Mario Bösemann
Agencement technique Antoine Camuzet
Son et vidéo Alex Wittwer, Tobias Zürcher

et toutes l’équipe technique TOBS! 

Responsable doublure lumière Michèle Péquegnat
Surtitres Stephan Ruch
Conduite des surtitres Valentina Bättig, Ruben Monteiro Pedro, Stephan Ruch

Les décors ont été realisés dans nos propres ateliers.
Mise à disposition de bijoux: Bastian Wigger, Laura Nick.

Eine florentinische Tragödie / L'Heure espangole - Auf den Punkt gebracht


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Remarque: cette vidéo a été réalisée lors d'une répétition avec les costumes de répétition.

Richard Flury – un compositeur soleurois

Toute sa vie, Richard Flury (1896-1967) est resté étroitement lié à sa région d'origine, Soleure. C’est peut-être pour cette raison que ce musicien natif de Biberist n'a jamais atteint une notoriété internationale. Pourtant de son vivant, il était déjà considéré comme une voix prestigieuse de la musique suisse: ses œuvres furent remarquées par des orchestres de renom et par de nombreux grands noms de la musique tels que Wilhelm Backhaus, Pau Casals, Walter Gieseking ou Richard Strauss, qui se sont intéressés à son travail. A l’instar de la critique qui a régulièrement rendu hommage à son langage musical expressif et à son impressionnante indépendance stylistique.

Flury a bénéficié d'une formation complète: des études en Sciences humaines et Musique l'ont conduit à Berne, Bâle et Genève auprès de professeurs renommés comme Hans Huber, Joseph Lauber ou Felix Weingartner. C'est à Vienne qu'il a parachevé sa formation de compositeur, où il a aiguisé sa plume artistique auprès de Joseph Marx. Après avoir terminé ses études, Flury retourna à Soleure, où il enseigna le violon à la Kantonsschule. Pendant plus de trois décennies il dirigea le Stadtorchester. En tant que chef d’orchestre, il a également collaboré avec de nombreux autres ensembles de la région, ainsi qu’avec l’Orchestra della Radio Svizzera Italiana, qu’il a dirigé régulièrement au Tessin. Mais en parallèle, il fut un compositeur extrêmement productif qui laissa derrière lui une œuvre d'une ampleur impressionnante. Celle-ci comprend cinq symphonies, quatre opéras, des ballets, des concertos, de la musique de chambre, de la littérature chorale, des Lieder et des œuvres pour piano. Nombre de ces œuvres ont été récemment réenregistrées et rendues accessibles à un plus large public.

La musique de Flury est fortement influencée par le romantisme tardif, même si certains passages montrent que les développements modernes l'intéressaient tout à fait. Mais il restait étroitement attaché à la tonalité, dont il explorait les possibilités avec une harmonie pleine de fantaisie et une orchestration sensible.

«Eine florentinische Tragödie» est le premier opéra de Flury, composé entre 1926 et 1928. Il est basé sur la pièce éponyme d'Oscar Wilde, publiée à titre posthume en 1906, qui avait déjà suscité l’intérêt de plusieurs compositeurs, notamment Alexander von Zemlinsky, qui l’avait mise en musique. En s’appuyant sur la même traduction allemande de Max Meyerfeld, Flury a créé une œuvre de chambre musicale intense qui a été jouée pour la première fois le 9 avril 1929 par le Städtebundtheater Biel Solothurn de l'époque.

Les réactions furent enthousiastes. Les critiques louèrent la «partition pleine de beauté exquise» (Neue Zürcher Zeitung) de même que la «peinture bouleversante de l’âme d’un art nouveau» (Berner Tagblatt).

La nouvelle production actuelle d’«Eine florentinische Tragödie» invite à redécouvrir un chapitre presque oublié de l'histoire de l'opéra suisse.

1 – Rebekka Maeder, Martin Mairinger, Martin Achrainer
2 – Rebekka Maeder, Martin Mairinger, Martin Achrainer
3 – Rebekka Maeder, Martin Achrainer, Martin Mairinger
4 – Rebekka Maeder, Martin Mairinger, Martin Achrainer
Eine florentinische Tragödie © Joel Schweizer & Konstantin Nazlamov

Maurice Ravel – La précision en clin d'œil

Maurice Ravel (1875-1937), fils d'un père suisse et d'une mère basco-ibérique, est né à Ciboure, en France. Très tôt, il fut fasciné par la précision mécanique – un intérêt qui se reflète dans son style de composition méticuleux et son goût pour les séquences musicales rigoureusement calculées.

Dès 1889, Ravel étudia au Conservatoire de Paris, notamment auprès de Gabriel Fauré, et développa très tôt sa propre signature artistique: la clarté stylistique, l'instrumentation raffinée et un sens infaillible de l'équilibre structurel sont ses marques de fabrique.
Son œuvre la plus célèbre est sans doute le «Boléro», une graduation musicale à la manière d'un mouvement d'horlogerie – presque sans développement thématique, mais d'une force hypnotique. En revanche, «L'Heure espagnole», le premier opéra de Ravel, est moins connu. Ironiquement, il dure moins d'une heure, mais fait pourtant partie de ses œuvres les plus longues.

À l'origine, Ravel souhaitait écrire une étude musicale sur le tic-tac de plusieurs montres à des tempos différents, une «symphonie horlogère». Il a ensuite intégré cette idée sous forme humoristique dans son opéra: il en a résulté l'histoire d'une femme d'horloger et de ses deux amants, qui se cachent successivement dans des caisses d’horloges – jusqu'à ce qu'un troisième homme entre à l’improviste dans la danse. Cette comédie musicale divertissante, dans l'esprit de l'opera buffa, dévoile avec un humour raffiné la morale bourgeoise, les clichés sur la masculinité et la mécanique des relations humaines.

Malgré son humour, l'œuvre fut mal perçue et a été critiquée pour son caractère jugé «pornographique». Le livret, avec ses nombreuses allusions équivoques, y est pour beaucoup. Le fait que l'épouse avide d’adultère ne soit nullement inquiétée pour ses agissements – et surtout qu’elle ne meure pas sur scène, contrairement à ce que prescrit sou-vent l’opéra – a probablement aussi joué un rôle non négligeable. La création eut finalement lieu le 19 mai 1911 à l'Opéra-Comique de Paris. Aujourd'hui, «L'Heure espagnole» ne fait certes pas partie du répertoire courant, mais elle est parfois reprise avec grand plaisir – notamment grâce à son traitement orchestral brillant, qui en fait un chef-d'œuvre de précision musicale.

Eine florentinische Tragödie / L'Heure espagnole - Meet the cast


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Remarque: cette vidéo a été réalisée lors d'une répétition avec les costumes de répétition.

Oscar Wilde

Oscar Wilde

L'écrivain, poète et dramaturge irlandais Oscar Wilde (1854-1900) est surtout connu pour ses satires sociales acerbes. Parmi ses œuvres les plus célèbres figurent le roman «The Picture of Dorian Gray» et la comédie «The Importance of Being Earnest». En 1877, Wilde a passé quelque temps à Florence, où il aurait eu une liaison passionnée. Il est possible que cette expérience ait nourri son drame fragmentaire «A Florentine Tragedy», probablement écrit entre 1893 et 1894, qui aborde les thèmes de l'amour, de la jalousie et de la trahison. La création eut lieu à titre posthume, en 1906 seulement.

En plus de ses succès littéraires, Wilde fut également une figure marquante en tant que critique social et esthète; on lui doit encore aujourd’hui autant d'innombrables citations que de bons mots. En marge de ses grands succès, il connut cependant une chute dramatique: en 1895, il fut condamné pour relations homosexuelles et fréquentation de prostitués masculins et passa deux ans aux travaux forcés. Après sa libération, il se retira à Paris, où il mourut en 1900.

Franc-Nohain

Franc-Nohain

Né à Paris en 1872, l'avocat Paul-Jean Toulet était déjà entré dans le monde littéraire sous son nom de baptême, avant d’adopter le nom de plume de Franc-Nohain. En tant que dramaturge et écrivain, il s’est fait connaître pour ses œuvres humoristiques, souvent satiriques, traitant de sujets sociaux avec un mélange d'ironie et de critique acérée. Sa pièce de théâtre «L'Heure espagnole», écrite en 1907, est une comédie humoristique qui décrit avec une brillante ambiguïté linguistique la tentative d'une femme mariée de vivre une aventure érotique. La pièce attira l’attention de Maurice Ravel, qui s’en inspira pour composer sa comédie musicale éponyme. Franc-Nohain en adapta lui-même le livret.

L'auteur mourut à Paris en 1934. Même si sa popularité n'a jamais atteint celle de ses contemporains Georges Feydeau ou Jean Giraudoux, la contribution de Franc-Nohain au paysage théâtral français reste vivace – notamment grâce à «L'Heure espagnole».

Réflexions sur la double soirée musicale

Deux opéras courts qui ne pourraient pas être plus différents, l'un empli de tension, lyrique et fortement émotionnel, l'autre élaboré avec raffinement et précision, plein d'humour et de fantaisie.

Pour Richard Flury, le modèle inspirant de l'opéra éponyme fut livré par Oscar Wilde avec son fragment cryptique, «Une tragédie florentine», tandis que Maurice Ravel invente quant à lui un monde de rythmes et de sons pour la comédie «L'Heure espagnole» de Franc-Nohain.

Richard Flury réalise une pièce de chambre qui se situe, non sans raison, à la Renaissance. Une époque où l'on se souvient de la nature des choses, de l'individualité et de la liberté de l'homme.
Celui-ci compose dès lors un huis-clos haletant et dense, des psychogrammes d'un homme poussé à la folie, d'une amoureuse transie et d'un prince sûr de ses atouts, livrés sans défense au cours de leur destin.

Pour son premier opéra, Ravel choisit au contraire une comédie, une plaisanterie en variations sur les innombrables grivoiseries et ambiguïtés sexuelles du langage français en lien avec les horloges. Une sorte de commedia dell'arte à la française, avec des personnages typés, ou plutôt des «automates», comme Ravel les appelle, plutôt que des êtres humains.

Les deux opéras ont en commun une femme et son amant, la passion et la tromperie, et donc le thème de l'amour, du désir et de la liberté, même s'ils sont évalués, vécus et considérés différemment.

Au premier plan de cette double soirée se trouvent selon moi les deux artistes et contemporains Oscar Wilde et Maurice Ravel. Tous deux ont en commun un grand désir de liberté, la recherche du beau et de la joie, l'humour, l'ironie, et un penchant pour l'expression de soi, associé à une exigence esthétique particulièrement originale et élevée – très excentrique chez Wilde, plutôt introvertie chez Ravel.

La Renaissance illustre ces valeurs, le savoir et la philosophie de l'Antiquité. Elle constitue le fondement intellectuel et spatial de la tragédie florentine.
Wilde fait ainsi référence à ce qu'il souhaite pour son époque: un nouvel essor de l'esprit libre – après que celui-ci ait été réprimé à la Renaissance par l'Église catholique et l'absolutisme – ainsi que la libération de la morale contraignante, des conventions sociales et des structures de pouvoir.

Ravel fait d'abord l'expérience de cette liberté, l'utilise et la défend. Il s'associe à des musiciens, des écrivains et des peintres qui partagent ses idées et forment des communautés d'artistes qui s'encouragent et s'inspirent mutuellement à oser inventer en dehors des conventions, à créer de l'art pour l'art, avec curiosité, passion et liberté.
Beaucoup de choses inédites deviennent possibles à cette époque – tant techniques, sociales, sociétales que politiques. Le nouvel esprit d'invention ne semble pas avoir de limites. Le monde devient plus cosmopolite: on conduit des voitures, on vole, on photographie et on filme. Les influences d'autres cultures se reflètent dans l'art, on danse en public, on aime les personnes du même sexe et on est polygame. Ravel aime le progrès, la nouveauté et l'étrangeté.

Mais ce renouveau ne dure pas non plus. Les puissances sont avides, la politique envahissante, mégalomane et insatiable, l'homme est vaniteux et prêt à la violence – la Première Guerre mondiale est à la porte. Pour Ravel aussi, cette guerre marque une césure: la légèreté est perdue, il part lui-même à la guerre, fait l'expérience de la violence et de la souffrance.

Aujourd'hui, malgré tous les progrès et les acquis humanitaires, nous nous trouvons à nouveau au seuil d'une possible guerre qui éclipse tout, qui dévore déjà les ressources, menace la culture et l'éducation et rend les gens à nouveau fanatiques, aveugles et belliqueux.
On reste saisi et sans voix.
Une fois de plus, les idéaux des Grecs anciens pourraient montrer la voie: l'humilité, le respect de l'individu, la vie en harmonie avec la nature, l'amour.
Ils pourraient donner de l'espoir.
C'est ce que j'aimerais raconter.

Pour Oscar Wilde, le prince trouve son modèle dans l'héritier du trône anglais, surnommé «Bertie», le futur roi Edward VII, un coureur de jupons invétéré, bien connu également dans le milieu des prostituées. L'une de ses maîtresses était Lillie Langtry, une amie proche d'Oscar Wilde, qui apparut plus tard dans ses pièces. Ce que l'Église diabolisait et reprochait au «petit homme» comme un crime et un péché était toléré et parfois même encouragé dans la noblesse et à la cour.

Dans un tel monde, deux hommes s'affrontent chez Flury/Wilde: Simone, le soldat inquiet pour son existence, qui donne sa vie, et Guido, le séducteur, enfant du pouvoir et de la supériorité, auquel Bianca succombe, se rend et suit son désir, ouvertement, de façon moderne, Simone est à la guerre, il la vit lui-même, physiquement, ce que nous voyons est son fantasme.

Ce qui suit, dans la comédie de Franc-Nohain, ce sont des survivants parmi les décombres de la guerre. Tout est en ruine, perdu, isolé. C'est dans ce vide que résonne la musique enchanteresse de Ravel, celle de la mécanique, de la solitude. L'amour est désir, mais les hommes sont blessés, des êtres dans un monde merveilleux vulnérable, affamés de chaleur, émouvants dans leur espoir.

A mon sens, les femmes représentent l'amour et donc l'espoir d'un autre chemin.

Stefan Zweig a écrit:
«Tout comme la guerre, quelqu’un doit commencer la paix.»

Me confronter et prendre position, ne pas rester indifférente, c'est ma contribution.

En vous remerciant de votre intérêt.
Anna Magdalena Fitzi

Je tiens à remercier de tout cœur Mario Gremlich pour les nombreuses réflexions patientes et le partage de mes questions ouvertes.

1 – Martin Achrainer, Konstantin Nazlamov, Josy Santos
2 – Josy Santos, Martin Achrainer
3 – Josy Santos, Martin Mairinger
4 – Josy Santos, Flurin Caduff
5 – Martin Mairinger, Josy Santos
6 – Flurin Caduff, Konstantin Nazlamov, Martin Mairinger
L'Heure espagnole © Joel Schweizer

«Au Soldat, mort pour rien»
Anne Janssens

«Sans se préoccuper de tes aspirations,
Sans te demander ni ton avis, ni ton choix,
Des êtres sans scrupule et sans compréhension
T’ont envoyé au front où toujours tu guerroies.
Tes amis et famille attendront vainement
Ton prompt retour et la pensée de te revoir
Sain et sauf les poursuit avec acharnement
Et même le temps ne pourra les faire choir.
Au fond de ton cœur tu sais que ta fiancée
Que tu aimes et qui t’aime souhaiterait
Te serrer dans ses bras, tendrement t’embrasser,
Te dire en secret les milliers de bienfaits
Dont elle espérait t’entourer ardemment.
Mais toi tu restes là, tu rêves sourdement
A tous ces moments forts que tu ne connaîtras
Sans doute plus jamais, ou bien dans l’au-delà.
La course aux armements, les bombes atomiques,
Maudites guerres de religions, bataille
Pour le pétrole où quête absurde et despotique
De tyrans au cœur de pierre, toi valetaille
De la société à leurs yeux, tu as le droit,
La gloire et l’honneur de sacrifier ta vie,
Ton avenir et tes espoirs pour un pays
Que tu chéris et en lequel tu avais foi.
Mais le glas sonnera la fin des illusions
Et ouvrira la porte à un monde meilleur
Où peut-être enfin tu trouveras le bonheur
Et rejoindras ceux qui furent aussi de pions.
Quand au milieu du combat tu recevras
Un coup fatal, en plein cœur ou bien dans la tête,
Tu pourras monter au ciel et faire la fête
Du haut de ce monde vil que tu désertas.
Nul ne se souviendra de ce jeune bleu
Victime de l’état, soldat méticuleux
Corvéable à merci, jouet d’esprits mesquins,
D’hommes nus de pitié, et qui mourut pour rien!»

PAROLES DES JEUNES; Edition Nea

«An den Soldaten, gestorben für nichts»
Anne Janssens
(Übersetzung)

«Ohne sich um deine Sehnsüchte zu kümmern,
Ohne dich nach deiner Meinung oder Wahl zu fragen,
Schickten Wesen ohne Skrupel oder Mitgefühl
Dich an die Front, wo du endlos kämpfst.
Vergeblich werden deine Freunde und deine Familie 
Auf deine baldige Rückkehr warten, und der Gedanke,
Dich sicher und unversehrt wiederzusehen, verfolgt sie unerbittlich,
Selbst die Zeit vermag sie nicht zum Aufgeben zu bringen.
Tief im Herzen weisst du, dass deine Braut,
Die du liebst, die dich liebt, nichts sehnlicher wünscht,
Als dich in die Arme zu schliessen und zärtlich zu küssen,
Dir insgeheim von tausend Zärtlichkeiten zu erzählen,
In brennender Hoffnung, dich so zu umfangen.
Doch du bleibst dort, träumst dumpf versunken
Von all den tiefen Momenten, die du zweifellos
Nie mehr erleben wirst, es sei denn im Jenseits.
Wettrüsten, Atombomben,
Verfluchte Religionskriege, Schlachten
Um Öl, oder absurder, despotischer Wahn
Von Tyrannen mit Herzen aus Stein, und du, der Bodensatz
Der Gesellschaft für sie, du hast das Recht,
Den Ruhm und die Ehre, dein Leben zu opfern,
Deine Zukunft und deine Hoffnungen für ein Land,
Das du geliebt und an das du geglaubt hast.
Doch das Totengeläut wird das Ende der Illusionen einläuten
Und die Tür öffnen zu einer besseren Welt,
Wo du vielleicht endlich das Glück finden wirst
Und jene wiedertriffst, die auch nur Spielsteine waren.
Wenn du mitten im Kampf den tödlichen Schlag empfängst,
Mitten ins Herz oder vielleicht in den Kopf,
Kannst du zum Himmel aufsteigen und jubeln,
Hoch über der schlechten Welt, die du verlassen hast.
Niemand wird sich erinnern an den blutjungen Menschen,
Opfer des Staates, den pflichtgetreuen Soldaten,
Immer verfügbar, Spielball niederer Geister,
Erbarmungsloser Menschen, gestorben für nichts!»

aus PAROLES DES JEUNES, Verlag Nea

Partenaires institutionnels

Partenaires institutionnels

Ville de Bienne
Ville de Soleure (avec le soutien du canton et des communes de la repla espace Soleure)
Canton de Berne
Syndicat Biel/Bienne-Seeland- Jura bernois pour la culture
 

Impressum

Impressum

Droits de représentation:
Richard Flury «Eine florentinische Tragödie»: Richard Flury-Stiftung Biberist
Maurice Ravel «L’Heure espagnole», version pour Kammerorchester: Schott Music GmbH & Co. KG Mainz

Éditeur:
Théâtre Orchestre Bienne Soleure TOBS!
www.tobs.ch
Saison 2024/25
Programme n° 5

Directeur général: Dieter Kaegi 
Textes et rédaction: Meike Lieser 
Traduction: Isabelle Wäber (f), Meike Lieser (poème, a)
Relecture: Béatrice Schmidt
Layout: Aline Boder

Création: Republica AG
Photos des générales piano et orchestre: Konstantin Nazlamov, Joel Schweizer
Choix des photos: TOBS!
Nature morte: Hermann Fitzi, Florence, 2002

Avril 2025

Pour des raisons de droits d’auteur, il est interdit de faire des photos et des enregistrements audio et vidéo pendant les représentations.

Les affiches de la production peuvent être achetées à la caisse du théâtre.

Nous nous réjouissons de recevoir vos remarques et vos commentaires sur la mise en scène: direction[at]tobs.ch.

Références bibliographiques:
Poème «Au Soldat, mort pour rien» d’Anne Janssens, extrait de «Paroles des jeunes», Edition Nea
Tous les autres textes sont des contributions originales pour ce programme. L'interview avec Paul Mann a été réalisé par Meike Lieser le 2 avril 2025 en anglais.

Sources:
richardflury.ch
Richard Flury: «Lebenserinnerungen», Verlag Habegger, Derendingen, 1950
Urs Joseph Flury: Richard Flury, texte dans le livret de l’enregistrement «Eine florentinische Tragödie», Toccata Classics, London, 2019
«Eine florentinische Tragödie»,  cahier de documentation de la Richard Flury-Stiftung Biberist

www.br-klassik.de/aktuell/news-kritik/maurice-ravel-150-jahre-100.html
www.forumopera.com/v1/opera-n15b/ravel/heure_espagnole.htm
Theo Hirsbrunner: Maurice Ravel und seine Zeit, Laaber Verlag, 2014
Nigel Simeone: Maurice Ravel, dans: Ravel – The Complete Edition, © Decca (Universal Music) 2012

Soutien

Nous remercions nos sponsors & partenaires pour leur soutien.